Les royaumes Mossis - 5e

 

Entre le sud de la boucle du Niger et la forêt, les royaumes Mossi vont se constituer au $X^{ième}$ siècle. Ces états animistes auront une solide organisation politique, économique et religieuse, et constitueront un empire original et démocratique.

Selon la légende, les royaumes Mossi seraient fondés par Ouédraogo fils de la princesse Yennenga. À partir du $XI^{ième}$ ou au $XII^{ième}$ siècle, les premiers royaumes mossis se sont constitués : le Gourma, le Mamprousi, le Dagomba, le Yatenga et le royaume de Ouagadougou. Ce dernier devint rapidement le plus influent. A partir du $XIII^{ième}$ siècle, les Mossi ont constitué deux États, ou plutôt deux fédérations d'États, dans la partie centrale de la boucle du Niger. Aux $XIII^{ième}$ et aux $XIV^{ième}$ siècles, ces royaumes s'opposèrent aux grands empires de la boucle du Niger (Mali et Songhay) dont ils n'hésitaient pas à attaquer et razzier les marges, quand ils ne s'enfonçaient pas plus profondément. La puissance de leurs armées permit aux royaumes mossis de préserver l'essentiel de leur indépendance. Mais, à la fin du $XV^{ième}$ siècle, l'Empire Songhay établit sa suprématie sur la boucle du Niger, mettant fin aux chevauchées des Mossi. Jaloux de leur pouvoir, les rois mossis s'opposèrent toujours à une unification du pays mossi. Mais ces royaumes présentaient une remarquable cohésion sociale et religieuse et une stabilité politique exceptionnelle : ils se maintinrent jusqu'à la conquête française, à la fin du $XIX^{ième}$ siècle.

Les Mossi, peuple policé et discipliné, vivent dans une société hiérarchisée, monarchique et très conservatrice.

Le royaume avait à sa tête un roi: Morho-Naba (roi des Mossi). C'était un roi absolu et divinisé. Il était entouré de ministres et rois vassaux. C'était le symbole du pouvoir et de l'ordre. Il était assisté d'un gouvernement de seize $(16)$ membres dirigé par le Widi-Naba (premier ministre. Son successeur était choisi parmi les princes de sang par un collège électoral de $4$ ministres. C'était la monarchie élective. Le royaume était divisé en province et les provinces en cantons.

Les autochtones ayant accepté la cohabitation après leur défaite et les conquérants eurent à respecter la civilisation des vaincus. Les Mossi étaient ruraux et animistes. Ce respect mutuel entraîna la stabilité sociale.

Une armée régulière n'existait pas. Le chef de guerre avait le commandement en cas de conflit et les Mossi utilisaient la levée en masse qui mobilisait tous les hommes valides. C'est ce qui lui a valu la réputation d'être un bastion invulnérable. 

Les Mossi ont formé un bloc réfractaire à l'islam et constitué d'états bien organisés dans l'unité et la stabilité. Ils vont disparaître à la fin du $XIX^{ième}$ siècle à la faveur de la colonisation française.

Le roi Nédéga avait une fille, Yennenga, qui était une guerrière illustre. Elle conduisait elle même au combat ou au pillage les cavaliers de son père, mieux que ne l'aurait fait le meilleur capitaine. Heureux d'avoir un pareil chef, Nédéga ne voulait pas se séparer de sa fille et refusait de la marier. Un jour, Yennenga montée sur son cheval le plus fougueux, partit à la tête de ses troupes pour razzier des tribus voisines, vers Tenkodogo. En route le cheval s'emporta et entraîna la princesse dans une épaisse forêt, loin de sa troupe ; lorsque la fatigue le força à ralentir, il s'arrêta devant une hutte. Un jeune chasseur en sortit et offrit l'hospitalité à la princesse épuisée. Il se nommait Riâlé ; il était le fils d'un prince malinké mais avait quitté sa famille pour vivre dans la forêt profonde et y chasser les éléphants. Yennenga et Riâlé décidèrent d'unir leurs vies et restèrent dans la forêt où ils étaient heureux. Un fils leur naquit, qu’ils appelèrent Ouidiraogo (étalon). Le roi Nédéga croyait sa fille morte et se désespérait. Quand Ouidiraogo fut devenu un jeune homme, Yennenga envoya un messager auprès de son vieux père pour lui apprendre la vérité. Nédéga fit répondre qu'il attendait avec joie sa fille, son gendre et son petit-fils ; il voulu les garder auprès de lui, mais Yennega et Riâlé préférèrent retourner dans la forêt. Ouidiraogo reçut du roi de belles armes et des chevaux de prix ; il succéda à Nédéga et fut le fondateur de l'empire Mossi. Lorsque Nédéga mourut, son corps fut rapporté à Gambaga ; son tombeau devint un lieu de pèlerinage et on y sacrifiait, au décès de chaque Naba, un cheval et une femme.

 

                       D'après J.-L. Monod